Dans d’autres régions de l’Inde, on connaît Guru Ravidas sous le nom de Saint Rohidas ou Raidas. Son nom est célèbre dans le Maharashtra (surtout à Pandharpur), au Rajasthan et à Varanasi, ce qui indique qu’il a dû voyager dans tous ces lieux et y passer un temps non négligeable. La croyance veut que sa durée de vie ait été extraordinairement longue. De fait, son nom est mentionné dès l’époque du Bhaktivijaya de Mahipati, où il est décrit comme un contemporain de Saint Dnyaneshwar – alors que bien des années plus tard, le même saint est décrit comme le guru de Mirabai. Cela déroute les historiens et rend difficile d’établir sa date de naissance. Néanmoins, il y a une chose dont on est sûr : Ravidas était un saint extraordinaire.
Auteur : Achala
Né dans une humble famille de cordonniers, intouchables, et gagnant sa vie en fabriquant des chaussures, il était également totalement réalisé en Dieu, détaché de ce monde depuis le moment-même de sa naissance. Il s’est réincarné dans ces circonstances données, car il se trouve qu’il avait désobéi à son guru, Swami Ramanand, dans une vie précédente. Résultat : il était maudit de renaître dans une famille de cordonniers. Le miséricordieux Swami Ramanand, qui était encore dans son corps lors de la réincarnation de Ravidas, retrouva son disciple à sa naissance suivante. Son amour pour son disciple était si illimité qu’il attendit patiemment que son disciple renaisse.
Quand Swami Ramanand rencontra Ravidas, ce dernier reconnut immédiatement son guru. Swami Ramanand instruisit Ravidas d’apprendre la profession de sa famille et de fabriquer des chaussures pour les pèlerins, tout en gardant son esprit toujours fermement focalisé sur Dieu.
Ravidas, envahi de joie d’avoir reçu l’adesh (l’instruction) de son guru, le suivit instantanément, pour le plus grand plaisir de son père. À partir de ce jour, il se mit à fabriquer des chaussures pour les pèlerins et les Vaishnaves, tout en récitant continuellement le Nom du Seigneur.
Même s’il accomplit si fidèlement l’ordre donné par son guru et par son père, du fait de son détachement naturel pour le monde matériel, il donnait souvent gratuitement des chaussures aux pèlerins et donnait fréquemment aux pauvres l’argent qu’il avait gagné. Cela finit par tant énerver son père, qu’il l’expulsa de la maison. L’humble saint loua le Seigneur pour cette opportunité parce qu’à présent, vivant seul, il pouvait librement chanter les gloires du Seigneur. Il construisit une petite hutte juste en dehors de Pandharpur, où il chantait le Nom du Seigneur jour et nuit, tout en cousant des chaussures.
Quelque temps plus tard, le roi eut besoin de se préparer à la guerre. Comme il préparait tout le nécessaire pour ses soldats, il avait aussi besoin de nombreuses paires de chaussures. Le roi demanda donc à chaque cordonnier de la région de fabriquer 1000 chaussures en l’espace d’une semaine. Tous furent ravis d’entendre cela, car c’était une opportunité de gagner beaucoup d’argent. Mais comment une telle tâche était-elle possible pour un dévot tel que Ravidas, de fabriquer 1000 chaussures en une semaine, alors qu’il passait la plupart de son temps perdu dans ses pensées avec le Seigneur et chantant Ses louanges ? D’habitude, il fabriquait seulement quelques paires de chaussures par semaine, ce qui lui suffisait tout juste pour subvenir à ses besoins.
Après six jours, le pauvre Ravidas n’avait pas même fini de couper le cuir requis pour 1000 paires de chaussures. Il savait que s’il ne finissait pas cette tâche, le roi le punirait. Réalisant que tout dans la vie arrive par la volonté du Seigneur, il continua à faire de son mieux et à chanter ses bhajans.
Et comment le Seigneur miséricordieux aurait-Il pu laisser son dévot dans une situation aussi désespérée ?
Dans la soirée, un jeune homme vint voir Ravidas. Il lui raconta qu’il avait entendu d’autres cordonniers dire que Ravidas recherchait une personne pouvant l’aider avec son travail. « D’où viens-tu, jeune homme ? Comment t’appelles-tu ? » demanda le saint. L’homme répondit : « Mon nom est Rangan. Je viens de Pandhari. »
Ravidas était plus qu’heureux et invita l’homme dans sa boutique, convaincu qu’il était une aide envoyée par Dieu. Il dit : « Faisons tout ce que nous pouvons cette nuit, même si je ne peux pas finir les 1000 paires de chaussures. » Le jeune lui dit de ne pas s’inquiéter et l’assura qu’il avait beaucoup d’expérience et qu’il était capable d’accomplir ce travail en une nuit. Ravidas lui demanda alors de coudre pendant que lui couperait le matériau.
Avant qu’ils ne commencent à travailler, Rangan remarqua une tanpura dans un coin de la boutique. Il demanda à Ravidas : « Est-ce que vous chantez ? » Ravidas répliqua qu’il adorait chanter le Nom du Seigneur mais qu’il craignait, s’il commençait à chanter, que ça ne fasse que ralentir leur travail. Rangan l’encouragea quand même à chanter, disant que lorsqu’il entendait des bhajans, son travail allait plus vite. Ravidas accepta avec joie.
Et le travail commença. Ravidas, à chanter joyeusement les gloires du Seigneur Krishna et à couper le cuir, et Rangan, à coudre les chaussures. Le saint fut surpris de voir qu’après la fin de la première chanson, le jeune homme avait terminé plusieurs paires de chaussures. Rangan dit que s’il pouvait travailler si vite, c’était seulement parce qu’il écoutait les chants du Seigneur, ce qui remplissait son cœur de joie. Il réassura à Ravidas que s’il continuait de chanter, ils auraient sûrement terminé les 1000 chaussures au petit matin.
Tard dans la nuit, Ravidas commença à sentir que Rangan pourrait être Panduranga Lui-même. Il aurait pu jurer qu’il voyait l’image de Panduranga dans le jeune homme.
« Es-tu Panduranga ? » demanda-t-il enfin.
Rangan se contenta de sourire et répondit : « Tu es si absorbé dans le Nom du Seigneur que tu Le vois partout, même en moi ! » Il rirent tous deux et continuèrent à travailler.
Lorsque le soleil fut levé, après une nuit entière de chant et de travail dans une joyeuse atmosphère, Rangan avait terminé toutes les 1000 paires de chaussures, comme promis. Ravidas loua Rangan pour son excellent travail. Rangan lui dit alors qu’il avait besoin de prendre un bain – donc il se rendit à la rivière. Ravidas l’invita à revenir après ses ablutions, pour un bain d’huile parfumée, des vêtements, un repas, et tout l’argent que le roi donnerait pour les chaussures. Ravidas n’était pas le moins du monde intéressé par les biens matériels. Il voulait juste faire son devoir, heureux de renoncer aux fruits de ses actes et de tout donner à Rangan. Le jeune homme accepta et se rendit à la rivière pour prendre son bain.
Pendant ce temps, les soldats du roi visitèrent la boutique pour collecter les chaussures. Voyant leur qualité extraordinaire, ils donnèrent beaucoup d’argent à Ravidas en récompense. Même après leur départ, Rangan n’était pas revenu. Un peu inquiet, Ravidas ferma boutique et se rendit à la rivière à la recherche de son jeune ami. Rangan n’était pas là. Il s’enquit de Rangan auprès des gens du coin et comprit que personne ne l’avait vu ce matin-là. Il retourna à sa boutique et commença à le rechercher dans le marché et à d’autres endroits mais il ne put le trouver nulle part.
Finalement, cela tomba sous le sens. Rangan de Pandhari n’était autre que le Seigneur Panduranga Lui-même ! Bien sûr. Il était venu dans la soirée, après que les portes du temple soient closes, et Il était rentré à Pandharpur avant l’aube, afin que les prêtres ne remarquent pas Sa disparition !
Lorsqu’il réalisa cela, Ravidas s’évanouit sur le coup. Comme Il est humble et miséricordieux, ce Seigneur au teint sombre était venu l’aider au milieu de la nuit, juste pour que le saint puisse continuer à chanter ses chansons douces.
Quand Ravidas reprit conscience, Il prit l’huile parfumée, la tenue et la nourriture qu’il avait préparé plus tôt pour Rangan, ainsi que l’argent donné par le roi, et il se rua vers Pandharpur. Quand il arriva au temple, il expliqua aux prêtres ce qui s’était passé et leur donna tous les cadeaux, pour que le Seigneur puisse recevoir un bain d’huile parfumée et recevoir de lui de nouveaux habits, ainsi que tout l’argent.
Et c’était seulement le début des miracles qui se produisirent ensuite dans la vie du grand Guru Ravidas. Ce saint devint plus tard un guide et un guru pour de si grandes âmes, comme le Roi Pipa et Mirabai en personne. Il a écrit de nombreux poèmes saisissant louant le Seigneur, comme celui-ci :
À la vue de la pauvreté
les gens rient et se moquent,
et tel était mon calvaire.
Mais maintenant, je détiens les pouvoirs
de la création dans la paume de ma main –
tout cela grâce à Ta miséricorde.
Tu sais que je ne suis rien,
Ô Ram, destructeur de la peur.
Sri Guru Ravidas
Après une durée de vie extraordinaire sur ce plan terrestre, Saint Ravidas acheva son parcours de vie à Chittorgarh. Sa crémation eut lieu près du temple de Mirabai pour Krishna. Là, face au temple de Mira, se trouve une petite ombrelle (chhatri), appelée Sant Raidas ki Chhatri, sous laquelle on peut encore aujourd’hui trouver la gravure d’une empreinte de pas de Saint Ravidas.
Paramahamsa Vishwananda détient des reliques de Sri Guru Ravidas dans sa large collection du Musée des Saints de l’Inde à Shree Peetha Nilaya, permettant aux gens de les vénérer, d’apprendre de chaque saint, et ainsi, de se rapprocher de Dieu.
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