Quand on m’a demandé d’écrire un article de blog sur des expériences musicales, j’étais tout excitée à l’idée d’interviewer Sashwatadasananda, un brahmachari venant des États-Unis. Je l’ai rencontré il y a cinq ans, et j’ai pu le voir grandir dans sa dévotion à Guruji, particulièrement au travers de sa pratique du kirtan. Nous avons parlé de son parcours depuis son tout premier contact avec Bhakti Marga et Guruji, de son explication du kirtan, et de ses conseils à quiconque voudrait commencer à apprendre.

Interviewé par : Karunavidravaddasi

 

PEUX-TU DÉCRIRE TON PARCOURS AVEC LA MUSIQUE DÉVOTIONNELLE ?

Mon parcours musical a débuté en 2016. J’ai toujours été fasciné par la musique, mais je ne savais pas où j’avais envie d’aller avec ça. À cette époque de ma vie, j’étais quelqu’un de très discret, et de manière générale, je n’étais pas en accord avec certaines de mes qualités. Mais je voulais faire le pas de me rendre « bien », et l’un de ces pas consistait à devenir plus musical. Le piano m’avait toujours intrigué, et j’avais même pris des cours, j’apprenais les accords etc. Mais d’une certaine manière, je me sentais insatisfait. Toute une suite d’événements m’a fait rencontrer, sans que je ne m’y attende (à mon insu), un dévot qui m’a invité pour un OM Chanting dans un temple.

Je dois dire que ça m’a vraiment plu. Pas seulement de faire quelque chose d’inhabituel avec des gens, mais aussi d’utiliser ma voix pendant 45 min sans s’arrêter, et comme je l’ai mentionné plus tôt, je n’étais pas un bavard. Donc, je n’étais pas très bon, ne serait-ce qu’à utiliser ma voix en général. Le OM Chanting consiste à utiliser constamment votre voix pendant 45 minutes, et particulièrement après la première fois, je me rappelle d’être rentré chez moi, rempli d’une telle énergie ! Vous pouvez demander à ma mère ! Je sautais dans tous les sens, en lui racontant tout sur le OM Chanting. Ça donnait : « Maman, tu ne vas pas croire ce que j’ai fait ce soir ! » Elle était si contente de m’écouter, et cette expérience était une telle ouverture pour moi. Je dirais que le OM Chanting a marqué le départ de mon parcours dans la musique dévotionnelle, parce qu’en tout premier lieu, j’avais besoin de m’ouvrir. Je peux dire que toutes ces dernières années, Guruji a mis sa magie en œuvre pour, petit à petit, ouvrir mon cœur, presque comme au « pied-de-biche ».

Avec le temps, j’ai fait plus de OM Chanting au temple. Enchanté, j’ai aussi expérimenté d’autres pratiques qui m’ont complètement changé la vie. Mais lorsque j’allais m’asseoir dans le temple, je remarquais des instruments de musique sur le côté. Cela me rendait très curieux. Je me disais : « Je me demande ce qu’ils font ? Est-ce cela qu’on appelle le kirtan » Après quelque temps, ils m’ont invité à une soirée kirtan au temple et – je ne peux même pas l’exprimer par des mots – c’est à ce moment-là que j’ai réalisé que quelque chose appelait profondément en moi. C’était exactement ce que je recherchais, et je ne peux même pas décrire comment je l’ai su.

Je voudrais aussi mentionner rapidement quelque chose d’intéressant. Avant de rencontrer qui que ce soit au temple, mon vieil ami et moi, nous avions de très longues conversations sur ce que pouvait être le but de la vie. Il disait souvent que son but était d’avoir une femme, des enfants, un travail à temps complet, et qu’alors il aurait tout dans sa vie. Mais de mon côté, je lui disais : je voulais vraiment faire quelque chose de musical, et d’une façon ou d’une autre, je voulais changer le monde. Et il répondait : « Pourquoi dis-tu ça ? » Et encore maintenant, je me demande : « Pourquoi je dis ça ? » Mais maintenant, je réalise qu’avec le kirtan, au moins de la manière dont Guruji nous a demandé de répandre Sa mission en partageant le Nom du Divin – pour moi, cela veut dire changer le monde. Je ne réalisais pas que ce que je demandais était quelque chose de dharmique

Donc, pour en revenir à ce que je disais, lorsque j’ai fait pour la première fois l’expérience du kirtan, je pense que ça a résonné si profondément en moi que mon âme est entrée dans une joie extatique. Parce que même après cette première soirée, j’ai couru dans ce champ tout seul dans le noir, comme un fou. J’avais les bras en l’air et je me sentais juste tellement heureux. Je me sentais vraiment, réellement heureux. Donc j’ai su que je voulais en apprendre davantage. À cette époque, j’ai entendu des récits sur Guruji, mais je ne comprenais pas ce qu’était un guru, et je ne comprenais pas ce chemin, ni cette culture, de suivre un satguru. Je ne comprenais pas le chemin de cette manière, tout ce que je savais, c’était que je me sentais connecté avec le OM Chanting, l’Atma Kriya Yoga, et particulièrement avec le kirtan

Mais ensuite, cette première dévote que j’avais rencontrée m’a dit : « Si tu aimes vraiment la musique, tu devrais aller à l’ashram en Allemagne, à Shree Peetha Nilaya parce qu’ils ont un festival de musique ! » Elle m’a demandé si j’aimerais rencontrer Guruji. J’étais un peu choqué parce que je n’avais encore jamais voyagé, je ne savais pas ce qu’était un guru, je ne savais pas ce qu’était l’Hindouisme, et j’avais un peu peur. Mais je me suis accordé du temps, et finalement, je devais décider si j’allais faire cet acte de foi.

Ce à quoi j’en suis arrivé, c’est que j’avais juste envie de changer intérieurement, et que j’imaginais que je pourrais commencer à changer en entamant un grand voyage. Donc après un certain temps de maturation, je me suis dit : « Ok, je pense que je vais faire ça, je ne sais pas pourquoi je vais le faire, mais je vais essayer ! »

Donc c’est exactement ce que j’ai fait !

Il y a toute une histoire aussi sur la façon dont j’ai obtenu mon billet pour l’Allemagne, qui était un petit miracle en soi. En y repensant, on dirait que beaucoup de miracles se sont produits, de façon subtile. Je suis arrivé à Shree Peetha Nilaya une semaine avant que le Just Love Festival ne commence. J’étais sans dessus-dessous, surtout du fait d’être dans un autre pays, et parce que les personnes du centre étaient si différentes. J’ai retrouvé un ami que j’avais rencontré avant de venir en Allemagne, et suis souvent resté avec lui. Le premier soir, il a dit : « Ok, mets tes habits de prière – les prières vont commencer au temple ! » Donc nous avons couru jusqu’au temple où se jouaient les kirtans, mais cette fois, c’était différent. C’était les prières quotidiennes qui ont lieu deux fois par jour, et l’expérience dans son ensemble était choquante. Je ne me suis pas du tout senti connecté ! Je disais : « Oh mon Dieu, ils sautent, ils crient, ils tapent des mains  » et je me sentais complètement perdu !

La semaine s’est écoulée, et j’avais du mal à m’adapter à ce nouvel environnement,  et j’ai passé la semaine à contempler qui était Guruji, parce que tout le monde me racontait des histoires sur Lui. Après avoir bataillé toute la semaine, quelqu’un est venu me voir et m’a dit : « Guruji est là, tu L’a vu ?  » J’en étais arrivé à devenir très curieux : qui est-Il ? Mon attention n’était plus sur la musique mais sur Guruji. Quand je L’ai vu la première fois, tout mon système était sous le choc. Je ne sais pas pourquoi. Plus tard dans la soirée, Il m’a appelé devant toute la foule et m’a demandé pourquoi j’étais si nerveux quand je suis arrivé la première fois à l’Ashram. Je ne savais pas quoi dire alors j’ai juste haussé les épaules et Il S’est éloigné. Je me suis agenouillé vers mon ami et j’ai demandé : « Comment a-t-Il su que j’étais nerveux ? Il n’était pas là quand je suis arrivé !  » et mon ami a dit : « Il sait tout.  » Ensuite, l’un des résidents a marché vers moi avec un grand sourire et m’a dit : « C’est la première des nombreuses rencontres que tu auras avec ton guru ! ” et j’ai pensé quant à moi : « J’ai un guru  »

Le Just Love Festival avait maintenant officiellement commencé – c’était la raison pour laquelle j’étais là au départ. Comme seva, je travaillais au bar à jus. On a carrément changé de rythme, mais c’est là que j’ai commencé à me lier avec d’autres résidents et à établir des relations. Comme c’est un festival, il y a beaucoup de musique, à manger, des boutiques etc. Plus le temps passait, moins je m’intéressais à la musique kirtan, bizarrement. À mon retour de voyage, ce que j’ai vraiment ramené avec moi, ce sont les gens que j’ai rencontrés, les dévots avec lesquels je m’étais lié, et mes premières rencontres avec Guruji.

Le temps passant, j’ai continué de retourner au temple. Quand mon ami est rentré  de l’ashram après 3 mois, il a commencé à me pousser à aller aux prières quotidiennes. Pendant des mois, je me suis assis seul à l’harmonium, écoutant les enregistrements et m’exerçant aux prières. Voilà les grandes lignes de mon entrée  dans la musique dévotionnelle.

 

POURRAIS-TU DÉCRIRE QUELLE EST TON EXPÉRIENCE ACTUELLE AVEC LE KIRTAN ? COMMENT C’ÉTAIT DE PASSER DE NE RIEN CONNAÎTRE DU KIRTAN, À CE QUE ÇA DEVIENNE UNE PARTIE IMPORTANTE DE TA VIE ?

Pour moi – et ce n’est pas la même chose pour tout le monde – j’ai été instantanément précipité dedans, comme pris par une tornade. J’étais tellement curieux. Intérieurement, j’avais une telle curiosité d’en apprendre plus sur ce que je ressentais, parce que le kirtan m’avait donné ce profond sentiment d’élévation. J’étais réellement en recherche d’un sentiment d’élévation, et l’essence du kirtan, c’est quelque chose qui ne peut que vous élever. C’était comme si j’avais trouvé de l’or, ou des diamants. C’était vraiment important pour moi, mais j’ai découvert que tout le monde ne résonne pas comme moi avec le kirtan. Pour d’autres, ça se passe avec l’Atma Kriya Yoga, ou en lisant les Écritures, ou avec la puja.

 

QUE RECOMMANDERAIS-TU À QUELQU’UN QUI VOUDRAIT COMMENCER À APPRENDRE LE KIRTAN ?

Musicalement parlant, le kirtan peut aller du très simple au très complexe. Très souvent, dès qu’ils viennent à Bhakti Marga, beaucoup de gens font souvent l’expérience d’un kirtan très technique ou complexe, comme les bhajans que Guruji et d’autres résidents de SPN aiment souvent chanter. Cela peut être décourageant pour beaucoup de monde car ils peuvent être plus ou moins musiciens. Je voudrais juste dire, en témoignage, que je n’avais pas tellement d’expérience musicale autre que d’apprendre à jouer des accords au piano quand j’ai découvert le kirtan. 

Si vous vous sentez d’apprendre la musique dévotionnelle, cela consiste à écouter et à découvrir. Vous devez rentrer dedans en profondeur et découvrir de quoi il est question pour vous. Il existe tant de vidéos et de choses en ligne, lisez les traductions ; vous pouvez déjà commencer à apprendre et à pratiquer les bhajans.

Et j’ai juste envie de souligner que le kirtan, c’est pour tout le monde. Je ne crois pas qu’il y ait qui que ce soit qui ne soit pas fait pour le kirtan. Quand je rencontre des gens qui veulent apprendre, je les pousse vraiment à chanter, même s’ils ne savent pas jouer d’un instrument. Parce que c’est ça, le kirtan : chanter et répéter le Nom Divin, et tout le monde peut faire ça, n’est-ce pas ?

 

COMMENT DÉCRIRAIS-TU LE KIRTAN À QUELQU’UN QUI N’EN AURAIT JAMAIS ENTENDU PARLER ?

Je le décrirais tout comme quelqu’un exprimerait son ressenti sur son expérience du Divin. Chanter des kirtans naît d’une joie profonde lorsqu’il est question de sa relation avec Dieu. Par exemple, on peut écouter les bhajans de saints et lire la poésie qu’ils ont écrite, qui découle d’une grande profondeur pour eux. Comme Sainte Meerabai – c’était une princesse qui est tombée amoureuse de Krishna, et qui s’échappait du palais pendant la nuit pour aller Lui chanter des bhajans ; ou Saint Tukaram, qui était complètement épris du Seigneur Vitthala, constamment à chanter Son Nom, en oubliant souvent ses devoirs envers sa famille. C’est clair, ça sonne complètement dingue dans notre monde moderne ! Mais comment pourraient-ils décrire l’amour qu’ils ressentaient pour Krishna ou le Seigneur Vitthala ? Aucun mot ne pouvait le décrire, cela n’aurait jamais satisfait leur désir impérieux de leur Bien-aimé. Et néanmoins, ils essayent de l’exprimer par leur dévotion. Une autre façon de le voir, c’est de dire que le kirtan est ce que vous faites quand vous appelez ceux que vous aimez, votre relation personnelle avec le Divin. Et c’est ce qu’il y a de plus beau !

 

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